Haricot vert : après une lueur d'espoir en 2017, les exportations repartent à la baisse
Produit phare d’exportation dans les années 90, le haricot vert, jadis fierté nationale, a fait connaitre le Burkina Faso dans le monde entier.
Dans les années 90, le Burkina Faso était premier producteur africain et le troisième exportateur de haricots verts sur le marché européen après le Kenya et le Sénégal.
Sur la période de 1990 à 1992, les exportations de haricots verts ont atteint 3300 tonnes avant d’amorcer une chute vertigineuse. En 2008, le Burkina Faso avait exporté 2 008,7 tonnes de haricots verts pour 130 millions de F.CFA de recettes.
Depuis, les exportations de haricot vert sont tombées à un niveau bas et continuent de maintenir une tendance baissière.
Après une tentative de reprise en 2017 marquée par une augmentation des recettes d’exportation de 28,8 millions de F.CFA en 2016 à 45,9 millions de F.CFA en 2017 soit un rebond de 59%, les exportations sont reparties à la baisse.
Les exportations de haricot vert en 2020
En 2020 le Burkina Faso n’a engrangé que 15,3 millions de F.CFA dans l’exportation de haricot vert contre 45,9 millions de F.CFA en 2017 soit un recul de 200% en valeur sur la période 2017-2020.
Pour ce qui est des quantités de haricots verts exportées, elles ont chuté de 745 tonnes en 2017 à seulement 255 tonnes en 2020 soit une dégringolade de plus de 65%.
La situation n’est guère reluisante en 2021 selon le constat fait par Investirauburkina.net.
Marché intérieur du haricot vert
En décembre le haricot vert est beaucoup demandé. Dans le mois de janvier le marché est saturé.
La majorité des producteurs visent plus le marché local (il offre un rendement très acceptable).
La deuxième difficulté est, quant à elle, liée à la planification des productions (comme la production n’est pas planifiée), il arrive souvent que les producteurs produisent à des périodes où l’offre est supérieure à la demande, tout chose qui crée la mévente.
La forte périssabilité du produit entraine des difficultés de conservation. Les infrastructures d’entreposage, de réfrigération et même de surgélation, sont indispensables pour assurer une bonne qualité du haricot vert tout au long de l’année pour le marché local mais également pour l’export.
Jusqu’aujourd’hui le Burkina Faso ne dispose d’aucune unité industrielle de transformation de son haricot vert. Le pays n’exporte que la matière première sans autre valeur ajoutée.
Problème de fret
Les problèmes de la filière ont débuté dans en 1985. Cette année-là, des quantités importantes de haricot vert n’avaient pas pu être exportées suite à des problèmes de fret.
Aujourd’hui encore le problème de fret reste d’actualité. En effet, le haricot vert burkinabè, du fait de son exportation par voie aérienne, revient trois fois plus cher que le haricot vert du Maroc, du Sénégal et de l’Egypte qui est acheminé par bateau sur le marché européen.
Le problème de fret est un problème majeur qui perturbe fortement les exportations. Même si les importateurs français apprécient la qualité du haricot vert burkinabè, ils déplorent les irrégularités d’approvisionnement, toute chose qui n’assure pas la disponibilité du produit en temps voulu.
Une autre conséquence est que ce problème de fret occasionne des difficultés pour les producteurs qui n’arrivent pas à exporter leur haricot vert, ce qui contribue à les démotiver et à impacter négativement les quantités produites.
Le président Capitaine Thomas SANKARA avait d’ailleurs créée manu militari en 1985, une compagnie aérienne de cargo dénommée Naganagani chargée du transport du haricot vert burkinabè sur le marché international.
Pour éviter la périssabilité du haricot vert du fait des problèmes d’acheminement sur le marché européen, le Président révolutionnaire en avait imposé la consommation aux fonctionnaires.
Le contexte actuel
La filière haricot vert fait face aujourd’hui à de nombreux défis.
Les années 80 qui ont connu l’apogée de la filière haricot vert sont bien loin derrière nous. Le marché international se situe dans un contexte différent.
Il faut compter avec l’arrivée sur le marché international de concurrents marocains, sénégalais et égyptiens qui acheminent leur haricot vert par bateau vers l’Europe.
Il ya aussi la question du prix du haricot vert, qui n’est pas fixe sur le marché européen. C’est la vente par commission et chaque exportateur négocie son prix avec son acheteur, ce qui n’est pas pour arranger les choses.
Déclin d'une filière jadis prolifique
Jadis valorisée et promue par l’Union des coopératives agricoles et maraîchères du Burkina (UCOBAM), le marché à l’exportation du haricot vert est au ralenti depuis plusieurs années.
La chute de la production serait venue du désengagement de l’Etat burkinabè après la période Révolutionnaire et de la libéralisation de la filière dans les années 93.
Abandonnée entre les mains des entreprises privées, l’entrée d’exportateurs fictifs aurait très vite sonné le glas d’une filière alors prolifique.
Ces bandits en cols blanc, bien que ne disposant d’aucun périmètre produisant du haricot vert, se rendaient en France pour négocier des marchés qu’ils étaient incapables d’honorer.
Ces hors-la-loi achetaient directement le haricot vert aux coopératives qui, initialement, vendaient leurs productions à l’UCOBAM.
L’UCOBAM qui assurait non seulement l’exportation du haricot vert sur le marché européen mais qui finançait également un grand nombre de coopératives pour l’approvisionnement en intrants fit alors faillite.
La filière désorganisée, toutes les coopératives paysannes qui vivaient grâce à l’UCOBAM, ont logiquement disparu, entraînant ainsi la chute vertigineuse de la production de haricot vert.
La solution pour une relance pourrait être la ré-implication de l’Etat dans la filière et la mise en œuvre d’une véritable politique d’appui en collaboration avec les organisations paysannes pour résoudre les principaux points de blocage de la filière.
Les producteurs attendent surtout du Gouvernement qu’il s’attaque au problème de transport aérien pour permettre d’acheminer facilement le haricot vert sur le marché européen.